Les maladies bucco-dentaires

Les chiens sont extrêmement nombreux à souffrir d’inflammation buccale ainsi que les 2/3 des chats, mais ils ne manifestent généralement pas leur douleur. Néanmoins, c’est une véritable urgence car les conséquences sont souvent très lourdes (douleur insupportable, perte des dents, anorexie et danger de mort).

L’efficacité des traitements est différente d’un animal à l’autre, les récidives sont fréquentes et il peut arriver qu’un traitement autrefois efficace s’inactive avec le temps. Pourtant, il est possible de soulager voire même de guérir une maladie bucco-dentaire à condition d’avoir une approche pluri-thérapeutique, intégrant des thérapies naturelles qui s’avèrent efficaces et qui ne présentent aucun effet secondaire à juste dose, même sur le long terme. En prévention des récidives, une bonne hygiène bucco-dentaire quotidienne et un bilan de santé régulier sont indispensables.

⚠ Les gingivites du chat dues au calicivirus du coryza sont souvent chroniques et la contagiosité est très élevée ! Ne brossez pas les dents de votre chat ou votre chien s’il a une gingivite avancée (risque de douleurs et de saignements) !

Les signes et les complications

Un animal qui a mal aux dents peut présenter un ou plusieurs signes physiques suivants :

Gingivite chez un chat, fin liseré rouge sur la gencive le long de la dent.

  • accumulation de tartre de couleur jaune à marron (plaque dentaire calcifiée) ;
  • mauvaise haleine ;
  • salivation excessive (provoquant parfois des croutes noires au niveau de la bouche) ;
  • carie ;
  • abcès dentaire ;
  • lésion ulcéreuse (souvent en regard des molaires et des prémolaires, dans la cavité buccale…) ;
  • pelage un peu hirsute, sale, terne (le chat ne fait plus sa toilette à cause de la douleur) ;
  • rougeurs (gencive*, parodonte, palais, langue, joue, babine et vestibule oral, fond de bouche ou cavité buccale) ;
  • abcès sous-orbitaire (en perçant, le pus coule sous l’un ou les deux yeux) ;
  • jetage nasal purulent permanent (lié à la destruction de l’os des alvéoles dentaires) ;
  • lésion de résorption du collet ;
  • déchaussement et perte des dents à terme.

* Présence d’une ligne rouge là où la gencive entre en contact avec la dent avec possible gonflement et saignements.

Les bactéries peuvent aussi se disséminer par voie sanguine, entraînant des infections à distance (foie, cœur, reins…) potentiellement graves. Aussi, le développement de fistules (sous les yeux ou entre la bouche et le nez), peut sérieusement mettre la santé de l’animal en danger.

Au niveau comportemental, le chat ou le chien atteint peut :

  • hésiter à saisir sa nourriture ;
  • changer sa manière de manger (sur un seul côté de la bouche par exemple) ;
  • mettre plus de temps à finir son assiette ;
  • manger moins voire cesser de s’alimenter (signe de douleur), ce qui entraîne un amaigrissement (danger de mort !) ;
  • crier de douleur en mangeant et s’enfuir comme s’il était poursuivi par un ennemi invisible ;
  • être stressé ou irritable devant sa gamelle (par exemple battements de queue ou miaulements chez le chat…) ;
  • ne pas saisir les objets durs (ou le chien en attrape un et mord dedans, il crie et le relâche aussitôt) ;
  • refuser qu’on manipule sa bouche ou même qu’on lui caresse la tête (crainte ou irritation) ;
  • devenir agressif ;
  • être prostré (ne joue plus, passe beaucoup de temps à dormir) ;
  • s’isoler ou au contraire solliciter davantage l’attention de son maître pour obtenir de l’aide.
Chez les chiens, la douleur peut être difficile à détecter car certains d’entre eux continuent de manger même avec d’affreuses tumeurs dans la bouche.

Les causes

Plusieurs causes, isolées ou associées, peuvent conduire à l’apparition de lésions inflammatoires :

  • bactéries dues au tartre (favorisé chez certaines races de chiens et de chats comme le Yorkshire, le Persan ou le Burmèse, une nourriture molle ou une mauvaise hygiène bucco-dentaire) ;
  • abcès dentaire (souvent la complication d’une carie dentaire non soignée) ;
  • lésions dentaires (entretiennent à leur tour l’inflammation, les racines dentaires jouant alors le rôle de véritables corps étrangers) ;
  • persistance de dents de lait chez le chien, conduisant à une « double dentition » (dents adultes correspondantes sorties) propice à l’installation précoce du tartre (les dents de lait non tombées doivent être retirées) ;
  • prédisposition individuelle (sans raison connue, le système immunitaire s’attaque aux gencives et racines dentaires) ;
  • déficit immunitaire dû à l’infection par les virus (calicivirus du coryza, herpèsvirus, FIV, FeLV…) ;
  • pathologies chroniques qui entraînent une immunodépression (diabète sucré, insuffisance rénale, hypothyroïdie, hyperthyroïdie…) ;
  • réaction allergique (plus rare) ;
  • tumeur.
Les chiens dont le poids est inférieur à 10kg sont plus prédisposés à la double dentition, au tartre et au déchaussement des dents.

Les examens complémentaires

En cas d’inflammation très importante, notamment en présence d’une stomatite caudale ou d’une forte gingivite, il est d’abord nécessaire de réaliser un bilan, le plus souvent sous anesthésie générale à cause de la douleur : description précise des lésions, recherche de virus (notamment le calicivirus à l’intérieur des lésions buccales, mais aussi le FeLV et le FIV sur prise de sang), radiographies pour déterminer s’il y a des dommages aux racines dentaires et aux autres structures de soutien.

Un bilan sanguin (hématologique et biochimique) peut être utile pour rechercher une maladie concomitante comme une insuffisance rénale, un diabète sucré, une hypothyroïdie, une hyperthyroïdie ou une anomalie hépatique.

Les traitements vétérinaires

Le traitement va dépendre de la sévérité et de la cause sous-jacente. En cas de pathologie chronique ou de cancer buccal en cause, une prise en charge médicale adaptée voire chirurgicale est urgente.

En premier lieu, un nettoyage de la cavité buccale élimine les germes responsables de l’inflammation. Il peut passer par un brossage des dents (déconseillé en cas de forte inflammation) et l’utilisation de bains de bouche à la chlorhexidine à mettre dans l’eau de boisson (Vet Aquadent® par exemple).
Des anti-inflammatoires, des antalgiques si nécessaire et des antibiotiques (pour contrôler la prolifération des bactéries dans la bouche) sont généralement prescrits dès les premiers signes. Les immunomodulateurs et les immunosuppresseurs peuvent également être employés dans la gestion des réactions inflammatoires excessives.
Alternative aux traitements classiques, le complexe d’acide gras ARA 3000 Alpha® soulage vite la douleur de la gingivite et les résultats sont parfois bluffants, mais certains animaux récidivent dès l’arrêt du traitement. Ce médicament est peu onéreux, pratique (1 injection par mois ou tous les 2 mois selon les cas) et sans effet secondaire.
Les injections d’interférons oméga recombinant d’origine féline sont aussi utiles pour leurs propriétés antivirales et immunomodulatrices.
Très prometteur, la thérapie cellulaire (cellules souches mésenchymateuses) est un traitement pour les maladies dysimmunitaires et inflammatoires grâce à ses propriétés immunorégulatrices. Un test est disponible pour savoir si l’animal va répondre à la thérapie cellulaire (taux très élevé). Le traitement est onéreux mais 2 injections suffisent.
Indolore et non invasif, le laser a des effets antidouleurs et anti-inflammatoires sur la gingivite et permet la guérison de la plaie. Hélas, peu de vétérinaires sont équipés car son prix est très élevé (coût d’une séance : 20€ à 30€).
En derniers recours, les corticoïdes, représentent la seule solution dans certains cas pour traiter la douleur et l’inflammation chez les animaux dont on ne peut extraire les dents. Cependant, ils ont des effets secondaires (prise de poids, risque de diabète sucré…) et sont susceptibles d’aggraver l’immunodéficience due à un éventuel rétrovirus. Il faut donc espacer leur utilisation et choisir d’autres techniques (laser…).
Enfin, un détartrage-polissage (sous anesthésie générale) peut s’avérer indispensable, après un bilan sanguin si l’animal est âgé. Il consiste à retirer le tartre qui se situe sur les dents, en face externe et en face interne, sous la gencive et dans l’os de la mâchoire.

A cette occasion, il peut être nécessaire de réaliser l’extraction de certaines dents (racine dentaire infectée, déchaussement des dents par la maladie parodontale…), car c’est souvent sous anesthésie générale que l’on peut le mieux détecter des lésions quelque fois non visibles au simple examen visuel.

L’extraction des dents permettra alors de ne pas avoir à réintervenir ! La douleur sera prise en charge par des antalgiques puissants (morphiniques au début, puis anti-inflammatoires). Suite à ces extractions, un grand pourcentage d’animaux guérit spontanément (pour les autres, des interférons administrés localement durant 1 à 3 mois montrent des résultats satisfaisants ou la Ciclosporine, très efficace à l’issue de 6 semaines sous suivi assez strict).

L’intervention se termine par un polissage de l’émail dentaire, réalisé à l’aide d’une polisseuse enduite d’une pâte abrasive. Il permet de lisser la surface des dents et d’éliminer les dernières rugosités. Par rapport à un détartrage « simple », le polissage permet de limiter et de retarder la réapparition de la plaque dentaire.

Contrairement à une idée reçue solidement ancrée, ce n’est pas le détartrage qui fait tomber les dents : il fait juste partir les dents déjà déchaussées qui ne tenaient plus que par le tartre faute de soins ! Ces dents étaient une source d’infection pour tout l’organisme et de douleur pour l’animal qui ne pouvait plus s’en servir !

⚠ Les détartrages trop fréquents abîment l’émail des dents et accélèrent ainsi la reformation du tartre par la suite. Par conséquent, il est indispensable de prendre des mesures d’hygiène dentaire pour prévenir le tartre.

Les médecines naturelles

Les produits naturels sont parfois suffisants seuls pour un traitement dit « de fond » ! Evidemment, il ne faut pas les utiliser tous en même temps mais l’un après l’autre de manière à tester celui ou ceux qui sont acceptés par l’animal et qui lui sont bénéfiques.

Selon les plantes utilisées, la phytothérapie a des propriétés intéressantes pour le traitement des maladies buccales : analgésiques, anti-inflammatoires, antibactériennes, antifongiques, antiulcéreuses, antivirales, immunomodulatrices, cicatrisantes, antidépressives… Prêt à l’emploi, le produit Buccanima® (aloe vera…) est très appétent et désinfecte tout en soulageant. Il s’applique directement dans la bouche ou se mélange à la nourriture (flacon de 100 doses).
Les huiles essentielles ont une action très puissante. Elles peuvent avoir des propriétés antalgiques, anesthésiantes, décongestionnantes, antibactériennes, antifongiques, antitoxines, antivirales, stimulantes immunitaires… et être utilisées localement, mais après une dilution très importante (demandez le dosage à votre vétérinaire) dans de l’huile végétale ou de l’aloe vera.

La prise orale d’huiles essentielles est bénéfique pour un traitement à long terme. Là encore, une spécialité vétérinaire existe, le Stimunvet®, sous forme d’une gélule molle qu’il ne faut surtout pas ouvrir car les huiles essentielles ont très mauvais goût.

⚠ Une surveillance des fonctions hépatorénales est conseillée avant et pendant la prise du traitement Stimunvet®.

La gemmothérapie (ou phytembryothérapie) est l’utilisation des jeunes pousses et des bourgeons sous forme de macérât concentré. C’est une thérapie très intéressante car le bourgeon est extrêmement riche en minéraux, oligoéléments, vitamines et facteurs de croissance. Ses vertus thérapeutiques varient en fonction de la plante : anti-inflammatoires, anti-infectieuses (bactériennes, fongiques, virales, parasitaires), antiallergiques, immunorégulatrices, stimulantes immunitaires, cicatrisantes…
L’apithérapie traite également les gênes buccales. La propolis possède des propriétés anesthésiantes, hémostatiques, antibactériennes, antifongiques, antivirales, cicatrisantes… Elle existe en poudre ou sous forme liquide (il ne faut jamais utiliser la forme alcoolisée). Le goût est en général bien accepté.

Le miel est aussi très efficace pour désinfecter et cicatriser les plaies et la prise spontanée par certains animaux en fait un traitement de choix pour les plaies buccales ou les gingivites (en toute petite quantité car riche en sucre !). Aussi, le pollen est un probiotique et un immunostimulant, facile à administrer. Attention, il doit être frais et conservé au surgélateur ou au réfrigérateur.

Enfin, quelques médicaments homéopathiques peuvent aussi être très utiles pour soigner les problèmes buccaux de votre chat ou votre chien. Respectez bien les doses prescrites.
  • Apis 5C : dès que réapparaît la rougeur de la gingivite.
  • Mercurius sol 5CH : si la douleur est intense.
  • Borax 5CH : en présence d’ulcérations sur les gencives et sur les bords de la langue.
  • Lachesis 5CH : lors d’association de rougeur, douleur et saignements.
  • Thymuline 9CH : pour stimuler l’immunité.
  • Baptisia 5CH : peut être prescrit quand les lésions descendent sur le pharynx et quand l’odeur est forte.

Les moyens de prévention

La prévention des maladies bucco-dentaires se fait par la lutte contre les facteurs favorisants (vaccins, bonne gestion des maladies chroniques…) et une bonne hygiène dentaire.

Les mesures hygiéniques doivent être de préférence quotidiennes. Pour cela, brossez chaque dent de votre animal, verticalement et de chaque côté, avec un dentifrice sans rinçage pour chat/chien et une brosse à dents souple ou des doigts dentaires. Le gel antimicrobien et appétent Stomodine® F, à appliquer sans brossage entre les babines et les gencives, est un bon complément pour ralentir la formation de la plaque dentaire et renforcer les gencives.
Si votre animal ne se laisse pas faire, les bâtonnets ou autres friandises dentaires à mâcher quotidiennement constituent une alternative efficace et plus agréable à la fois pour lui et pour vous.
Certaines grandes marques d’alimentation pour chat ou chien proposent des croquettes dont la composition est enrichie d’actifs « antitartre », constituant un excellent outil de prévention. Il existe également des croquettes spéciales pour l’entretien de l’hygiène buccale (forme, composition…). Vérifiez toutefois qu’elles ne sont pas plus caloriques que les croquettes actuelles de votre animal pour contrôler son poids ou contre-indiquées s’il est malade.
Enfin, les compléments alimentaires antitartres à mélanger à l’eau de boisson ou à l’alimentation sont aussi très utiles et pratiques et ne changent pas le goût si vous les choisissez sans arôme et inodores !

La plaque dentaire commence à se redéposer huit heures à peine après le détartrage. Une bonne hygiène dentaire doit être mise en place, faute de quoi la bouche de votre animal sera dans le même état qu’avant le détartrage au bout de six mois !

⚠ Evitez les dentifrices contenant du fluor (préférez les dentifrices aux enzymes comme Orozyme), les os à mâcher (même en nylon), les objets trop durs ou trop solides (bâtons de bois…) et les balles de tennis qui abîment fortement les dents de votre animal et sont dangereux pour sa santé.

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